Le Sauveur a institué ce sacrement très auguste de l’Eucharistie qui contient réellement sa chair et son sang, afin que qui la mange vive éternellement; c’est pourquoi, quiconque en use souvent avec dévotion affermit tellement la santé et la vie de son âme, qu’il est presque impossible qu’il soit empoisonné d’aucune sorte de mauvaise affection. On ne peut être nourri de cette chair et vivre des affections de mort; si que, comme les hommes demeurant au paradis terrestre pouvaient ne mourir point selon le corps, par la force de ce fruit vital que Dieu y avait mis, ainsi peuvent-ils ne point mourir spirituellement, par la vertu de ce sacrement de vie. Que si les fruits les plus tendres et sujets à corruption, comme sont les cerises, les abricots et les fraises, se conservent aisément toute l’année étant confits au sucre et au miel, ce n’est pas merveille si nos coeurs, quoique frêles et imbéciles, sont préservés de la corruption du péché lorsqu’ils sont sucrés et emmiellés de la chair et du sang incorruptibles du Fils de Dieu. O Philothée! les chrétiens qui seront damnés demeureront sans réplique lorsque le juste Juge leur fera voir le tort qu’ils ont eu de mourir spirituellement, puisqu’il leur était si aisé de se maintenir en vie et en santé par la manducation de son Corps qu’il leur avait laissé à cette intention. « Misérables, dira-t-il, pourquoi êtes-vous mort, ayant à commandement le fruit et la viande de la vie ? » [...].
(Texte repris de "Introduction a la vie dévote" de Saint François de Sales)